La rue de l’Ancien Sénat, autrefois envahie par les dealers de drogue, a été transformée à l’initiative de Jean-Jacques Wanner, un passionné de jardinage, en havre de paix.
« Je n’ai jamais autant bossé de ma vie », s’amuse le retraité. Manches retroussées et sac poubelle à la main, Jean-Jacques Wanner défriche les feuilles mortes de son jardin un peu particulier. Derrière ce grand gaillard aux longs cheveux blancs se cache en réalité une tendresse inouïe quand il est question de ses plantes. Son objectif avec ce projet : éloigner les dealers de sa rue. « Quand on aime, on ne compte pas !», confie-t-il en souriant. 8 000 euros piochés dans son budget vacances lui ont permis d’avoir la vie tranquille. « Je préfère embellir mon quartier que partir en vacances. Ici, j’ai l’impression de l’être toute l’année. » Un investissement important pour ce serveur à la retraite.
Depuis quatre ans, Jean-Jacques Wanner a installé une centaine de pots de fleurs tout au long de la rue, créant un véritable jardin ouvert au public. « Plus j’avançais, plus je me rendais compte que la rue était magnifique. Je ne me suis jamais vraiment arrêté », raconte-t-il. Une initiative soutenue par la ville de Nice puisque la mairie lui fournit l’accès à l’eau pour arroser les plantes et l’autorise à les installer dans la rue.
Un bol d’air frais pour le voisinage
Les résultats sont visibles et appréciés par la majorité des habitants du quartier. « C’est le jour et la nuit depuis que je suis arrivée. Avant, les dealers se mettaient devant la porte sans gêne de 6 h à 17 h. Il y avait toujours des saletés, c’était insupportable ! », souligne Catherine, voisine de Jean-Jacques depuis 15 ans. L’intéressé se joint à la discussion après l’un de ses nombreux allers-retours à la poubelle : « Ça en devenait très dangereux, on ne se sentait plus chez nous », lâche-t-il. « Je ne pourrais pas refaire ce que Jean-Jacques fait. Je n’ai pas autant la main verte que lui », poursuit Catherine en riant. Les touristes aussi sont épatés. David et Mary, un couple californien de passage, s’exclament : « C’est très joli, on a l’impression d’entrer dans une autre dimension. C’est tellement bien fait. C’est un homme très courageux. »
Sac poubelle à la main, Julien, en vacances pour la semaine, s’émerveille en voyant le paysage qui se dresse devant lui : « Nous avons eu une vraie chance de trouver cette location dans ce petit coin de paradis. Avec ma femme, nous avons vraiment eu un coup de cœur pour Nice et cet endroit n’y est pas pour rien. » Au même moment, Mathilde, sa femme, surgit et confirme ses propos : « Cela va nous faire un déchirement de rentrer dans la Charente. Nous étions tellement bien ici», conclut-elle avant de repartir aider son mari à faire les derniers rangements.
« Nous n’avions pas les mêmes herbes »
Aujourd’hui, la rue de l’Ancien Sénat est devenue un exemple de transformation urbaine réussie. L’odeur agréable des fleurs embaume l’air et les habitants peuvent enfin profiter de leur quartier sans craindre pour leur sécurité. « Depuis quatre ans, je ne vois plus de soucis avec les dealers. Peut-être qu’aujourd’hui, une personne cache un sachet le matin et une autre vient le chercher l’après-midi, mais ça n’a plus rien à voir avec la situation d’avant qui était catastrophique. Nous n’avions pas les mêmes herbes », explique Jean-Jacques.
Une initiative récompensée
Grâce à son dévouement, Jean-Jacques Wanner a reçu la médaille du bénévolat le 18 juin 2024, une reconnaissance bien méritée pour cet homme qui a su redonner vie à son quartier. En tenue de jardinage, il continue de veiller sur son petit paradis. « Ma plus grande satisfaction est d’entendre, depuis ma fenêtre, les gens s’enthousiasmer et de les voir s’arrêter. Je n’ai pas besoin de plus. La rue est photographiée tous les jours en été. Je suis très content d’avoir participé à cela. » Mais Jean-Jacques ne veut pas s’arrêter la. Il couve un projet ambitieux pour 2025 dont il ne souhaite pas encore dévoiler l’issue…
Tony Carandante