Tirer dans le mille ! 

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Après avoir fait un 10.9 (meilleur score possible), j’arme pour un troisième tir à 10 mètres. © Francesca-Orsula Angelini

Tout juste revenu des tests internationaux, Romain Aufrère nous ouvre les portes du centre de Tir Sportif d’Antibes. Alors pour mieux comprendre cette discipline, le jeune champion du monde nous initie le temps d’une matinée. 

18 ans, champion du monde juniors et en lice pour décrocher son ticket pour Paris 2024, Romain Aufrère est devant la porte du centre de Tir Sportif d’Antibes. Je gare ma voiture et me dirige directement vers lui pour faire plus ample connaissance. D’une grande gentillesse et emballé par l’idée de ma visite par message, c’est le même sentiment qui me vient lorsque l’on rentre dans les locaux. Il est 10h30, la fraîcheur du matin nous accompagne dans les couloirs pendant toute la visite. Premier lieu, le club house. Une multitude d’affiches se dresse devant moi : informations, médaillé olympique et olympien, plannings… 

Nous continuons d’avancer tout en discutant de son emploi du temps de sportif. « Je fais quatre entraînements au centre, et avec le CREPS, je fais trois fois par semaine des séances de préparation physique ». Énorme ! Je ne me rends pas encore compte de ce que cette discipline implique au corps. Des policiers s’entrainent à tirer sur ma gauche. Romain prend ses affaires et m’emmène directement au stand de 10 mètres. Il fait chaud ! Nous sommes à l’intérieur. Le chauffage est allumé. Le sourire monte jusqu’aux oreilles lorsque je comprends que je vais pouvoir tirer ! 

Préparation, concentration et tirs ! 

Sur un banc, le carabinier pose sa panoplie d’équipements. Dans sa mallette, deux armes. Une pour la discipline du 10 mètres et une autre pour le 50 mètres. À côté, une énorme valise avec sa veste, son pantalon et ses chaussures. Tout est lourd. Environ 5 kg pour la carabine et le poids des vêtements permettent de gagner en stabilité. Tout en continuant à discuter sur ses techniques d’échauffement, il monte les différentes parties de son fusil. « Chaque préparation est propre à chacun. Moi, j’ai des exercices bien spécifiques à ma préparation physique », dit-il en ajoutant le busc (la partie où l’on pose la joue, ndlr). « J’échauffe le cou, les dorsaux et au niveau des omoplates », continue-t-il en mimant les mouvements. « Et puis les jambes. Tout ce dont j’ai besoin. » Dioptre (un élément arrière d’un système de visée d’armes, ndlr) et guidon (un organe de visée situé généralement à l’avant du canon, ndlr) en place sur la crosse, la séance peut commencer ! 

D’abord assise, Romain m’explique comment me positionner. La tête penchée pour voir dans le viseur, la carabine contre le creux de mon épaule gauche et la main droite sous la crosse. Je fais un test à vide. Je me sens prête. Le jeune médaillé d’or en Corée du Sud ajoute un plomb. Mon index est sur la détente. Je presse. 8.4 ! Je suis ravie d’avoir touché la cible ! Second coup… Dans le mille ! 10.9. C’est le score parfait. « Tu vas avoir de la concurrence si je viens à tes compétitions ! » Je me vante un peu trop, le coup d’après ne dépasse pas le 5. 

Dans les mêmes conditions qu’en compétition, ou presque… 

Maintenant que j’ai la carabine en main. Je me lève. C’est beaucoup moins stable. « Écarte un peu plus tes pieds. Ça te permettra de moins bouger. » Chose dite, chose faite. Je bouge toujours. C’est vraiment à ce moment que je me rends compte de la difficulté de cette pratique. Le regard bien concentré dans le dioptre, je dois être relâchée et tonique à la fois. J’abaisse le canon pour avoir la cible en ligne de mire. Ma respiration se coupe. J’appuie sur la gâchette. Je souffle. Le plomb est hors de la cible. Je recommence. Touché ! Après plusieurs passages, je m’améliore et me rapproche du centre. C’est super satisfaisant ! J’adore. 

Surprises sur surprises. Au centre de tir d’Antibes, il n’est pas anodin de croiser des visages olympiens. Alexis Reynaud, médaillé de bronze aux Jeux de Rio en 2016, vient nous saluer. Sourire aux lèvres, il donne l’idée à Romain d’aller sur le stand des 50 mètres. Positionnés proches du chauffage, nous prenons les affaires pour nous diriger à l’extérieur. Là, de l’herbe et des cibles en papier. Le jeune homme me montre la position assise et m’explique que cette pratique se fait dans trois positions. Coucher, à genou et debout. Trop dur, je reste assise. Cette carabine pèse environ 7 kg. La détente est sensible. L’impact du tir se ressent dans le creux de mon épaule. Un tir à froid. Je mets la balle dans le canon. Hors cible. Manque de précision. La douille saute, de la fumée sort de l’arme, je recommence. Une, deux, trois…, dix fois. J’ai réussi à toucher la cible plusieurs fois. Je pose l’arme, l’initiation est finie après une heure et demie. « Maintenant, il faut laisser le canon sécher pour que ça soit plus facile à laver », m’explique Romain. 

Je n’ai pas vu l’heure passer. En retournant au parking, nous discutons de ses prochaines compétitions dans les mois à venir, avec toujours en tête les Jeux de Paris 2024. L’Azuréen me laisse entre joie et satisfaction. Pour les plus curieux, il est possible de pratiquer le tir sportif avec une licence et une autorisation de détention d’armes. 

Manon Gimet