Musicienne et créatrice de l’association « Les Boubous », Joëlle Nighersoli se bat depuis maintenant 9 ans contre la pauvreté en Afrique. D’origine niçoise, la percussionniste de 58 ans se rend quatre fois par an au Sénégal. Seule ou accompagnée de ses proches, elle installe là-bas des pompes à eau et soigne les enfants dans le besoin.
Assise à la table d’un café, Joëlle Nighersoli est plongée dans un livre, « Un dieu et des moeurs » du journaliste Elgas. Bien qu’elle soit souriante, la bénévole a connu des périodes très difficiles au cours de sa vie, qui l’ont amenée à son combat actuel : sauver les enfants du Sénégal. Tout est parti d’une rencontre coup de coeur : il y a plus de 9 ans, lorsqu’elle a fait la connaissance d’Habibou, un jeune mauritanien de quatre ans. Lorsqu’elle raconte cette histoire, on sent encore l’émotion dans sa voix : « je travaillais dans un centre de transfusion sanguine. On m’avait parlé de ce petit garçon qui devait se faire opérer du coeur. J’ai pris la décision de l’accueillir chez moi pendant plusieurs mois après l’opération. Je me suis vite attachée à lui, il était brillant ». Faute de visa, le petit garçon que la musicienne surnommait « Boubou » est retourné en Afrique. Peu de temps après son retour, Joëlle apprenait son décès. « Il est mort de déshydratation, il avait 6 ans. Quand je l’ai appris, ça a été la descente aux enfers pour moi mais aussi le début de ma bataille. »
« Il m’avait fait promettre de ne pas oublier les autres enfants »
Après la terrible nouvelle, Joëlle ne se laisse pas abattre, au contraire. Elle crée l’association « Les Boubous », et utilise le visage du petit garçon comme emblème. À côté de ça, elle continue de jouer de la musique avec son compagnon, ce qui la passionne. Tout l’argent qu’elle gagne lors de ses concerts, elle l’utilise pour son association. « Je n’ai n’y ni subvention, ni salarié. J’utilise tout l’argent que je gagne grâce à ma musique ainsi que des dons. Boubou m’avait fait promettre de ne pas oublier les autres enfants ». Elle place alors toute son énergie dans l’association ce qui ne dérange pas sa famille puisqu’ils partent avec elle. Pendant que la bénévole installe des pompes à eau, son compagnon et sa fille amusent et soignent les enfants. Mais malgré son emploi du temps chargé, Joëlle a du mal à se remettre de la disparition du jeune garçon. Quelques années après sa mort, elle apprend qu’elle est atteinte du cancer du sein. Toujours avec le sourire elle raconte : « la maladie ne m’a pas arrêtée ! Même après mon ablation je continuais de partir au Sénégal. J’y ai trouvé des choses pires que le cancer. »
Enfants battus, violés ou encore vendus, elle découvre un cauchemar
Lors de ses voyages, la présidente de l’association a connu de grands moments de bonheur, mais aussi des images traumatisantes. « Là-bas, tout est interprété en commerce. Les enfants sont obligés de ramener de l’argent chaque jour sinon ils sont battus ou violés. Il y a aussi beaucoup de maladies et aucun médicament, c’est un véritable cauchemar » explique t-elle. Les années passent et Joëlle avance chaque jour dans ses projets. Aujourd’hui, elle travaille à ouvrir un centre culturel en Afrique pour sauver des enfants mais aussi pour laisser une trace. En France, elle communique régulièrement sur les réseaux sociaux pour faire connaître son association. « J’ai pensé à écrire un livre pour parler de ce qu’il se passe en Afrique. Mais je suis une femme de terrain, mon bonheur à moi, c’est quand je vois les sourires de tous ces enfants » témoigne la bénévole. Si il y avait un adjectif pour définir Joëlle, ce serait déterminée, quoi qu’on hésiterait avec courageuse. En riant, elle se souvient : « l’un de mes amis un jour m’a dit : « si John Lennon t’avait connu, il aurait écrit « Imagine » pour toi ! »
Léa Nicosia