École à la maison : maman, maîtresse et « méchant flic »

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A l’école, presque comme à la maison pour la famille Ritaine. © Léa Ritaine

À 35 ans, Virginie Ritaine est mère de quatre jeunes filles. Sa première mission en ces temps difficiles : assurer leur scolarité. Les nerfs à vif, elle témoigne de son expérience de maîtresse de fortune, depuis Thouars dans les Deux-Sèvres.

9 heures 30. La télévision s’allume. Patpatrouille donne vie à la maison thouarsaise peuplée de corps peinant à se réveiller. À la queue, Léa, Laura, Léna et Lorenza salivent pendant le service de Miel Pops. C’est le début d’une longue journée pour la famille Ritaine, qui tente de garder un rythme en plein confinement. Un mois que Virginie, leur mère et « normalement » surveillante de cantine, s’adapte à ce quotidien si « spécial ». La jeune femme s’affaire aux tâches ménagères, qui ne pourront être faites dans la journée, lorsqu’elle aura enfilé sa casquette d’enseignante et son mari, ambulancier, sera parti en première ligne. « Au début, je respectais l’emploi du temps des professeurs, confie-t-elle. Mais j’ai vite perdu le contrôle.» En effet, ses filles sont en Petite Section, CE2, CM2 et 6ème. Quatre niveaux scolaires, tous différents les uns des autres. « Pour les plus petites, j’arrive à m’en sortir. Malheureusement, je suis loin d’être une lumière en maths … Mon frère s’arrange pour nous expliquer les exercices par téléphone. » Au bout de quelques jours, elle a pu se rendre compte du temps que chacune prenait à faire ses devoirs. Un nouvel emploi du temps a fait son apparition, plus adapté. « Mon cerveau s’est mis à la gymnastique. » Il n’était pas question de continuer ainsi.

Au bord de la crise

10 heures 30. Le salon se transforme en salle de classe. S’enchaînent les sessions de coloriage, les dictées, les exercices d’histoire et de français pour ces cerveaux épuisés. Les plus grandes passent des heures à recopier le contenu du cours, puis à se tester sur les exercices et enfin à subir la correction. Mais ce sont surtout des soupirs et un esprit qui s’échappe ailleurs qui priment. « C’est aussi difficile pour moi que pour elles, constate Virginie. Je suis à la fois leur maman, leur maitresse et le méchant flic qui doit les recadrer toutes les 5 minutes. Nous n’aimons pas cette relation ! » Alors, ensemble, elles ont pris la décision de poser les crayons à 15 heures 30 avant de se lancer dans la préparation de pâtisseries maison. Aujourd’hui, c’est un gâteau arc-en-ciel, goûter qu’apprécie particulièrement Laura, la cadette. « Nous avons bien fait d’adopter un programme assez léger, avoue la Thouarsaise. Je ne dormais plus. Je finissais mon ménage à 3 heures du matin ou me levais à 5 heures pour être sure d’avoir le temps de tout faire. J’étais au bord de la crise de nerfs… C’est encore le cas à vrai dire. » Puis, après avoir partagé ses angoisses avec d’autres mamans, Virginie Ritaine a trouvé une solution temporaire. « Nous nous retrouvons en visio-apéritif à 19 heures 30, soulagées de pouvoir trinquer et passer un moment entre copines, loin des devoirs, des cris et du ménage. » Heureusement pour cette famille, c’est enfin les vacances. Sur les trois semaines restantes de quarantaine, deux se feront sans devoirs et dédiées a recharger les batteries.

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Pour Léa, 12 ans, « c’est très difficile, mais maman s’en sort bien »

Quand Virginie Ritaine a annoncé à sa fille qu’elle n’irait pas au collège pendant plusieurs semaines, Léa a vite compris que ce ne serait pas des vacances. « C’est très difficile de ne pas avoir mes professeurs. Maman s’en sort bien, mais ils ont une autre manière d’expliquer et j’y étais habituée quand même… »

L’aînée de la fratrie n’est pas encore prête à jouer la maîtresse avec ses soeurs, mais gagne en indépendance pour son propre travail. « J’ai peur de prendre du retard en Maths, mais je suis sûre que ma professeure ne nous en voudra pas. » De plus, les copines sont trop loin et les soeurs « trop proches, c’est très énervant ». Mais une chose est sûre, la jeune fille apprend de ce confinement. « Maintenant on sera peut-être plus patientes ! »