Rencontre avec Thoj, DJ niçois confiné, mais pas résigné

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Thoj fait partie du Label 96 Musique, tout comme un certain The Avener... ©Facebook Thoj

Sale période pour les artistes musicaux…Avec le confinement, l’annulation des concerts et la distance imposée au quotidien, difficile d’entrevoir l’avenir. Et pourtant. Certains restent très optimistes et plus motivés que jamais.

Thomas Le Du, alias Thoj, est l’un d’eux. DJ niçois installé à Paris, il a décidé de ne pas subir ce break forcé et s’attend à des retrouvailles très intenses avec le public. Pour EDJ News, il livre une vision artistique et personnelle pleine d’espoir.

Pour ceux qui ne connaitraient pas encore ton style de musique, comment le définirais-tu ?

Ce n’est pas forcément très simple…disons que c’est une musique très organique. Je laisse une grande place aux instruments dans mes compositions car à la base je ne suis pas Dj (rires) mais musicien, et c’est la musique électronique qui m’a amené à mixer dans des clubs. Moi ce qui me plait c’est d’être en studio et composer des sons avec ma guitare. C’est ça le projet Thoj !

D’où vient ce nom de scène ?

Je l’ai depuis tout petit. Ma sœur s’appelle Julie et moi Thomas, donc en mixant nos deux prénoms ça donne Thoj. Ce pseudo m’a toujours accompagné pour tous mes projets artistiques, donc c’était une évidence pour moi de continuer à le porter aujourd’hui.

Ton dernier morceau « Cold Hearted » est très dansant, avec un clip qui donne envie de voyager. Ce n’est pas vraiment au programme en ce moment…Comment tu vis ce nouveau confinement ?

Même si rester chez soi n’est pas la meilleure configuration pour un artiste, je ne le vois pas d’un mauvais œil. Au contraire, pour moi c’est l’occasion de faire beaucoup de studio, des covers de chansons qui me plaisent, et trouver une autre manière de partager ma musique. Et puis je travaille pour beaucoup d’artistes au quotidien, donc c’est plus facile de collaborer quand on est tous calés sur le même rythme de vie. Et puis il faut bien dire qu’on est moins contraints qu’au premier confinement.

Ça va repartir très fort, et les artistes devront être prêts !

C’est un état d’esprit que tu avais déjà en mars/avril ?

Oh non, pas du tout… (marque une pause). En début d’année, je pensais vraiment que ce serait la fin de ma courte aventure dans la musique, et je n’étais pas libre dans ma tête, comme beaucoup d’autres artistes. J’étais proche de m’arrêter…Aujourd’hui c’est complétement l’inverse. Je suis très optimiste sur l’avenir. Ça va repartir très fort, c’est une certitude. Ça sera long, oui, mais je suis persuadé que les gens vont avoir envie de rattraper le temps perdu, et de passer à nouveau des moments de fêtes, de joie…Et nous, artistes, devront être prêts.

Comment ça « être prêts » ?

Les gens ont hâte de retourner dans les clubs ou en festival…Pour nous (artistes, NDLR) tout est à faire, et forcément il y a une excitation de retrouver son public. J’attends ce moment avec impatience. Mais ça va encore plus loin ! Une amie m’a dit il y a peu de temps qu’elle ne peut pas s’évader sans musique, et que c’est synonyme d’espoir pour elle ! J’ai de plus en plus de personnes qui me suivent sur les réseaux sociaux, et qui me soutiennent. Ça veut dire beaucoup de choses…

C’est rassurant de savoir que le public est toujours là, malgré tout ?

C’est presque vital même… L’État a divisé tout ce qui nous entoure en deux parties : ce qui est essentiel, et ce qui ne l’est pas. Moi je ne me retrouve pas dans la bonne catégorie (rires), et forcément en tant qu’artiste, tu te demandes si ce que tu fais a un sens. On entend souvent que la musique, les bouquins les films sont les premières choses vers lesquelles ont se réfugie pendant le confinement. On est baigné en permanence dans la culture. Maintenant qu’on nous l’a enlevée, on se rend bien compte de ses vertus.

Tu arrives à rester optimiste, mais pourtant beaucoup d’artistes émergents abandonnent. J’imagine que ça te peine ?

Oui, c’est une réalité et il faut le dire. Tous les artistes n’ont pas forcément le moral, et c’est très triste. Je vois des gens tomber autour de moi, alors qu’ils sont bourrés de talent. Je vois des gens annoncer qu’ils arrêtent ou qu’ils mettent de côté leur carrière. Certains décident de faire un break sur les réseaux. Ce sont des décisions extrêmes. Remettre en question son art c’est normal, voire essentiel. Mais le renier c’est terrible…

Qu’est ce que tu te dis pour garder cette motivation essentielle ?

Je prends de la distance avec les évènements, au maximum. Deux ans dans une vie, dans une carrière c’est quoi ? c’est normal de douter dans des moments qui nous demandent une telle résilience, mais je ne pense pas que m’apitoyer sur mon sort serve à grand-chose. Contrairement à ce qu’on peut penser, cette période c’est une opportunité pour les artistes. Avec le rythme intense imposé par le monde musical, il y a un manque d’identité artistique qui s’est créé. Quand un DJ Snake cartonne, il y en a 10 000 autres qui émergent, et c’est le piège qu’on doit absolument éviter. Les plus belles créations viennent quand on prend le temps d’être spontané. Rien que pour ça, je ne peux pas regretter cette période.

La période qu’on traverse peut permettre à un artiste de se retrouver avec lui-même ?

C’est même plus profond que ça. Pour moi, le principal ce n’est pas la musique, mais trouver sa place dans la société. Trouver qui on est. Je me suis perdu pendant un long moment avant de réaliser que je n’avais pas la vie que je souhaitais. Moi c’est la musique, mais ça peut être n’importe quoi ! Même si ça doit prendre du temps, il faut arriver à trouver qui on veut être, parce que c’est en faisant ce qu’on aime qu’on fait les choses bien. On le dit souvent, c’est vrai, mais aujourd’hui ça prend tout son sens.